Lorsque Leone Pippard, photographe et journaliste indépendante de Toronto, a découvert l’estuaire du Saint-Laurent, au début des années 1970, elle s’est mise à photographier ces petites baleines que les pêcheurs locaux appelaient encore « marsouins ». Établie près de Pointe-Noire, à l’embouchure du Saguenay, elle s’est vite rendu compte de deux choses.
La première était que, s’il était difficile de distinguer entre elles ces baleines toutes blanches, qui ne sautaient pas commodément hors de l’eau et ne levaient pas la queue, on y parvenait tout de même. La seconde, c’est que, été après été, elle reconnaissait les individus, ce qui signifiait probablement que la population n’était pas très nombreuse. « Leone a tout de suite vu qu’il fallait protéger les bélugas et elle a été la première à lancer l’idée d’un parc marin, raconte le biologiste Robert Michaud, directeur du GREMM ( Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins ). Elle a aussi démontré qu’on pouvait les identifier individuellement. En 1984, elle m’a confié tous ses négatifs et ses dessins. Avec mon patron de l’époque, Pierre Béland, nous avons commencé à monter ce que nous appelons l’album de famille. »