Fondateur de la section de médecine de l’adolescence du CHU Sainte-Justine, où il est responsable de la Clinique des troubles de la conduite alimentaire, en plus d’être professeur titulaire de pédiatrie à la faculté de médecine de l’Université de Montréal, Jean Wilkins soigne depuis 36 ans ses «p’tites filles», comme il appelle affectueusement ses patientes. Dans son livre, Adolescentes anorexiques, plaidoyer pour une approche clinique humaine (Les Presses de l’Université de Montréal, 2012), il situe l’anorexie, cette grave maladie identitaire, dans un contexte médical et psychologique, et il défend âprement sa démarche clinique.

Propos recueillis par Hélène Matteau.
Photo: Amélie Benoist/BSIP/SPL Comment en êtes-vous arrivé à vous intéresser à la santé des adolescents?
Au début des années 1970, il était devenu nécessaire que la pédiatrie puisse répondre aux besoins spécifiques des adolescents. Alors, je suis allé faire un postdoctorat à l’hôpital Montefiore de New York, en 1973. Là, j’ai découvert les problèmes entourant la sexualité adolescente. Ça m’a secoué. À mon retour à Montréal, j’ai donc ouvert une clinique, au CHU Sainte-Justine, où l’on abordait les questions de contraception, d’agressions sexuelles, de MTS et d’interruption de grossesse. De plus, on avait toujours une clientèle de toxicomanes, surtout des jeunes de «bonne famille», qui se shootaient. L’impuissance des parents me troublait beaucoup.
Puis, on a dû affronter une nouvelle réalité: l’augmentation des séparations et des divorces.