Image: Milena Munera/Pixabay
Des chercheurs québécois ont mis au point un système de surveillance qui aiderait à prévenir les décès pendant les vagues de froid.
Des études scientifiques le soulignent: les vagues de froid causent plus de décès prématurés que les vagues de chaleur. « L’effet du froid sur la santé est plus grave que celui de la chaleur. C’est ce qui nous a motivés à aller de l’avant avec un tel système d’alerte pour les vagues de froid ici, au Québec», indique Fateh Chebana, chercheur en hydrologie statistique à l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) et un des auteurs de l’étude publiée dans Science of the Total Environment décrivant ce système dédié au froid – une première dans le monde – qui intègre des données de températures, décès et hospitalisations.
Mais avant d’en arriver à ce type de vigie en cas de froid, Fateh Chebana et son équipe avaient planché sur un système similaire efficace lors des canicules d’été. «Si vous vous souvenez, en 2003, en Europe, il y a eu une importante canicule qui a causé des dizaines de milliers de morts. Les pays n’étaient pas préparés et n’avaient pas avisé leur population en conséquence», observe Fateh Chebana. En 2010, il a travaillé, avec d’autres chercheurs de l’INRS et de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), à la création d’un système d’alerte de vagues de chaleur pour l’ensemble de la province québécoise.
Sa collègue Céline Campagna de l’INSPQ explique qu’en surveillant la météo, les hospitalisations et les décès dans chaque région, on est en mesure d’agir rapidement et de réduire les hospitalisations en lien avec les vagues de chaleur. Cependant, ce qui inquiète le plus les autorités de santé publique, ce sont les vagues de froid. Il était donc essentiel aux yeux des chercheurs de l’INRS et de l’INPSQ de se doter d’un tel système.
« On le sait depuis des années que le froid cause beaucoup de décès au Québec. Ce n’est nécessairement lorsqu’il y a un froid extrême. Juste le fait que ça soit plus froid que d’habitude peut provoquer des décès. En santé publique et en épidémiologie, on voit une relation très claire entre le froid et la mortalité, que ce soit ici ou en Europe du Nord», affirme Céline Campagna, responsable scientifique du programme sur les changements climatiques et la santé à l’INSPQ. Elle souligne que les personnes souffrant de maladies chroniques, comme les maladies cardiovasculaires ou respiratoires, sont plus susceptibles d’être affectées. «Les hospitalisations ou les décès peuvent survenir 2 jours après une vague de froid, parfois même jusqu’à 2 semaines après l’exposition au froid», ajoute-t-elle.
À partir de quel seuil est-ce dangereux pour les personnes plus vulnérables? L’équipe de chercheurs a pu déterminer des seuils de température en-dessous desquels l’on observe une surmortalité et à partir desquels une alerte pourrait être déclenchée et communiquée aux différentes directions de santé publique. Ces seuils varient entre -15 °C et -23 °C le jour et -20 °C et -29 °C la nuit. «Ce ne sont pas des températures extrêmes au Québec, mais on voit qu’à partir de ces niveaux-là, il y a des hausses de la mortalité», constate Céline Campagna. Quant aux surplus d’hospitalisations causées par le froid, les seuils sont compris entre -13°C et -23°C le jour et -17°C et -30°C la nuit.
Pour l’instant, les seuils sont les mêmes tout au long de l’hiver, mais les chercheurs prévoient faire évoluer leur système. Par exemple, ils voudraient tenir compte de la mortalité plus importante au début de l’hiver. «On remarque une plus grande mortalité liée à ces seuils au début de janvier. Pourtant, en février, il fait plus froid, mais le corps a eu le temps de s’acclimater», mentionne Mme Campagna.
Bien que la pandémie de COVID-19 ralentisse la mise en place du système d’alerte de vagues de froid, le chercheur de l’INRS Fateh Chebana soulève que déjà, d’autres villes canadiennes sont intéressées à le tester cet hiver.