Le populaire logiciel de visualisation de la Terre pourrait aider les jeunes Atikamekw Nehirowisiwok à approfondir leurs connaissances concernant les territoires ancestraux.
Accéder à Google Earth, cibler le territoire de sa nation et ses lieux importants, puis y ajouter des informations, des photos, des vidéos et des témoignages d’aînés de sa famille : c’est ce que les jeunes Atikamekw apprendront grâce au Laboratoire de cartographie participative de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue (UQAT) et au Conseil de la Nation Atikamekw. On espère ainsi développer leurs connaissances du territoire et favoriser la transmission des savoirs ancestraux.
Pour aider les adolescents à bien maîtriser Google Earth, un logiciel libre d’accès et facile à utiliser, des tutoriels de cartographies ont été conçus par Benoit Éthier, professeur à l’École d’études autochtones de l’UQAT et responsable du Laboratoire de cartographie participative. Il a bénéficié de l’expertise de Brian Thom, directeur de l’Ethnographic Mapping Lab de l’Université de Victoria, qui a plusieurs projets avec les Autochtones de l’Ouest canadien, et de Sylvie Poirier du département d’anthropologie de l’Université Laval.
Les chercheurs ont travaillé avec des cartes produites au début des années 1980 dans le cadre de négociations territoriales entre les gouvernements fédéral et provincial et les Atikamekw Nehirowisiwok. Les communautés autochtones devaient alors prouver leur occupation ancestrale et continue du territoire. Comme plusieurs autres Premières Nations, les Atikamekw Nehirowisiwok avaient fait appel à des anthropologues et des chercheurs autochtones pour documenter leur occupation et leur utilisation historique du territoire.
« Dans ces cartes, on a recensé diverses informations comme les itinéraires empruntés par des aînés, des sites patrimoniaux et culturels, des toponymes autochtones. Plusieurs membres de la nation souhaitaient rendre ces résultats accessibles afin de favoriser la transmission des savoirs aux jeunes générations », explique Benoit Éthier.
Les tutoriels feront partie du programme d’histoire et de géographie par le Conseil de la Nation Atikamekw qui sera lancé cet automne dans les écoles secondaires de Manawan et de Wemotaci. « Les tutoriels ont d’abord été créés en français, mais ils sont présentement traduits en nehiromowin, la langue des Atikamekw Nehirowisiwok, puisque les jeunes la parlent très bien », précise le chercheur.
Du Québec au Chili
Le projet est prometteur, et pas seulement au Québec : il pourrait faire des petits à l’international afin de servir d’autres nations autochtones qui vivent des enjeux semblables en matière de transmission des savoirs territoriaux.
Des discussions ont déjà lieu avec les Mapuches au Chili. « Nous regardons comment nous pouvons transposer nos formations dans leur contexte, ajuster les exemples pour qu’ils leur soient pertinents et traduire le tout », dit Benoit Éthier.
Le Laboratoire de cartographie participative de l’UQAT souhaite aussi que la transmission des savoirs territoriaux autochtones se poursuive à l’extérieur des communautés. « Nous voulons créer au moins un cours de cartographie autochtone et l’offrir dès 2022-2023, annonce le chercheur. Il sera intégré au futur certificat en gestion des ressources territoriales qui, on l’espère, sera suivi autant par des Autochtones que des non-Autochtones. »
Cet article a été réalisé en partenariat avec l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue.