Il y a des arbres coniques, des cylindriques… Certains poussent très rapidement; d’autres, lentement. Comment ces éléments, influencés par les changements climatiques, ont-ils un effet sur la capacité de la forêt à séquestrer le carbone ?
Traditionnellement, pour estimer le volume de biomasse forestière d’un arbre — laquelle est directement liée à sa capacité à stocker le carbone —, on mesure son diamètre à hauteur de poitrine et sa hauteur. Puis on prend la densité moyenne de l’espèce pour terminer le calcul. Un jeu d’enfant !
Or, cette façon traditionnelle de faire les choses risque de devenir désuète en raison des changements climatiques. C’est le genre de questions sur lesquelles travaille Robert Schneider, professeur au Département de biologie, chimie et géographie de l’Université du Québec à Rimouski (UQAR).
Son équipe a montré qu’avec un même diamètre à hauteur de poitrine et une même hauteur, le volume peut varier de plus de 5 % d’un arbre à l’autre lorsqu’on inclut dans la modélisation les variables climatiques et celles qui sont associées au type d’aménagement de la forêt. « C’est parce que la forme de l’arbre est affectée par ces facteurs; ainsi, le volume de la biomasse varie aussi », explique-t-il.
Le chercheur travaille également à évaluer l’effet du climat et du type d’aménagement sur la densité du bois, et ce, à l’échelle du Québec. Ses collègues et lui font ces calculs grâce aux cernes de croissance à l’aide d’un appareil de tomodensitométrie, communément appelé CT scanner, comme ceux qu’on trouve dans les hôpitaux.
« Plusieurs études ont montré que la densité varie avec le climat, mais ces études reposent sur des jeux de données qui ont une très faible étendue géographique, indique-t-il. Nous avons accès à un jeu de données couvrant la forêt boréale québécoise et de Terre-Neuve, nous donnant ainsi une grande variabilité géographique et climatique pour établir les liens entre la croissance, le climat et la densité du bois. »
De plus, on sait que, généralement, les éclaircies commerciales ont peu d’effets sur le rendement pour un certain volume. « Cela s’explique par le fait que, sur un territoire donné, on a plusieurs petits arbres qui poussent lentement, ou peu de gros arbres qui poussent rapidement; le volume est quasiment le même », précise le chercheur.
Néanmoins, les coupes forestières affectent-elles la densité des arbres qui restent, et, par conséquent, leur captation du carbone ? « Si les cernes des arbres deviennent plus larges à la suite d’une éclaircie commerciale — donc, que la densité du bois diminue —, la quantité de carbone qu’ils stockent pourrait varier », dit Robert Schneider.
En résumé, il y a pour le moment plus de questions que de réponses. « Il faut faire ces études alors que la société commence à parler de stockage de carbone par les forêts, affirme le chercheur. Voudra-t-on changer les paradigmes d’aménagement des forêts en conséquence ? Ce sera un autre débat. »
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