Tablette en argile datant de la Mésopotamie représentant un couple qui s’embrasse. Photo: The British Museum/CC BY-SA 4.0
Il y a bien longtemps que les humains s’embrassent. La preuve : des textes anciens dévoilent que cette pratique existait déjà en Mésopotamie il y a 4 500 ans!
On croyait jusqu’à récemment que la pratique du baiser romantique avait commencé en Asie, il y a 3 500 ans. Mais une étude publiée dans la revue Science viennent de faire reculer l’histoire du baiser d’au moins mille ans.
Spécialiste de l’écriture cunéiforme, l’historien Troels Pank Arbøll, de l’Université de Copenhague, a constaté que des textes provenant de la Mésopotamie (la Syrie et l’Irak actuels) décrivaient déjà le baiser romantique comme une coutume établie dans cette société ancienne. En entrevue avec Québec Science, il explique que l’écriture a pris naissance dans l’Irak antique. Des tablettes d’argile portant ces premières traces d’écriture, dont des milliers d’exemplaires ont réussi à être préservés, témoignent de cette époque.
« L’écriture a d’abord été utilisée comme une pratique administrative. Puis, on a commencé à y trouver des récits mythologiques et un peu plus tard, les premières références au baiser », indique Troels Pank Arbøll. On retrouve aussi sur les tablettes d’argile des proverbes, des dialogues érotiques entre un homme et une femme, des descriptions sur le baiser et les actes érotiques associés. On décrit également l’embrassade affectueuse d’un parent envers son enfant ou le bec amical. « Le baiser parental ou amical semble être universel et exister depuis très longtemps chez l’humain », explique le chercheur, qui considère que cette pratique était au cœur de la vie quotidienne de ces civilisations anciennes.
Selon lui, la coutume du baiser romantique pourrait même être encore plus vieille et dater de bien avant l’invention de l’écriture. Si l’on ignore toujours la période exacte à laquelle les humains ont commencé à s’adonner à cette activité intime, on sait que d’autres espèces animales s’embrassent. Par exemple, les bonobos se bécotent sur la bouche tandis que les chimpanzés le font de manière plutôt platonique. « Cela pourrait démontrer que le baiser chez l’humain est un comportement beaucoup plus ancien », souligne le chercheur de l’Université de Copenhague, qui a mené ces recherches avec sa conjointe, la zoologiste Sophie Lund Rasmussen (Université de Copenhague et Université d’Oxford).
Un saut dans le temps de mille ans
Le couple a eu l’idée d’approfondir les origines du baiser en lisant une étude sur la propagation du virus Herpes simplex (qui cause les éruptions cutanées communément appelées « feux sauvages »). L’étude en question montrait que l’introduction du baiser romantique pouvait avoir involontairement provoqué la dispersion du virus à l’âge du bronze. « Selon l’article, le baiser romantique serait né en Inde, vers 1500 avant J.-C, et le virus aurait pu se répandre à partir de ce moment-là. J’ai rapidement réalisé que nous disposions de sources [les écrits de la Mésopotamie] datant d’au moins un millier d’années avant cela », raconte le chercheur.
D’après lui, le baiser a pu contribuer en partie à la transmission du virus à cette époque, mais pas complètement; la migration des populations et le partage de la nourriture seraient aussi des facteurs de transmission du virus. La pratique du baiser devrait plutôt être considérée comme une coutume ayant plusieurs origines géographiques dans de nombreuses cultures anciennes.
Contrat sur une tablette d’argile concernant la vente d’un champ et d’une maison
(vers 2600 av. J.-C.) Photo: Wikimedia Commons
La richesse des textes cunéiformes
« Le cunéiforme est l’un des premiers systèmes d’écriture au monde, si ce n’est le premier », souligne le chercheur. Il n’est donc pas rare d’y découvrir les premières traces de plusieurs inventions humaines. « Nous recensons beaucoup de premières mondiales dans les textes mésopotamiens : la première image de la roue, par exemple, ou encore l’utilisation de mélanges de substances médicinales », ajoute-t-il.
