Photo: Pedro Groover (https://creativecommons.org/licenses/by/2.0/)
La Doncella, une jeune fille inca morte et momifiée il y a plus de 500 ans, offre aux chercheurs une opportunité unique d’explorer l’histoire des Incas et de leurs rituels de sacrifice humain.
As-tu déjà vu une momie, autrement que dans un film d’horreur ? Le Musée d’archéologie de haute montagne (MAAM), situé à Salta, en Argentine, en expose trois : un garçonnet et deux fillettes, dont la plus célèbre est connue sous le nom de La Doncella (La Jeune Fille). Les corps momifiés ont été découverts en 1999 par un groupe d’archéologues au sommet du volcan Llullaillaco, situé à la frontière entre l’Argentine et le Chili, à plus de 6 000 mètres d’altitude. Leurs corps ont été remarquablement préservés grâce aux conditions extrêmes qui règnent au sommet du volcan. Le froid intense, l’oxygène raréfié et la faible humidité ont permis leur conservation exceptionnelle.
Que faisaient ces enfants au sommet de cette montagne ? Ils ont probablement été tués dans le cadre d’un rituel appelé Capacocha, une pratique inca de sacrifice humain. Les victimes étaient choisies plusieurs mois avant le sacrifice et participaient à une longue procession jusqu’à la capitale de l’empire, Cuzco, avant d’être conduites sur la montagne pour être offertes aux dieux incas. Pour mieux comprendre ces rituels, une équipe de scientifiques a étudié les trois corps, dont celui de la Doncella, particulièrement bien conservée.
La Doncella semble avoir eu un rôle plus important que les deux autres enfants, car elle était vêtue d’une tunique de cérémonie et portait une coiffe, au moment de sa découverte. Les longues tresses de la jeune fille contiennent un certain nombre de marqueurs permettant de retracer son alimentation. Comme les cheveux poussent d’environ un centimètre par mois et demeurent ensuite inchangés, on peut suivre l’évolution des habitudes alimentaires. Ainsi, les chercheurs ont découvert la preuve de la consommation de substances psychotropes comme la coca (feuilles) et l’alcool, sous forme de bière fermentée à base de maïs.
Ces deux substances n’étaient pas utilisées au quotidien, mais plutôt lors de cérémonies et rituels. Or, la consommation de feuilles de coca aurait commencé durant la dernière année avant le sacrifice et aurait considérablement augmenté durant les six derniers mois de leurs vies, avec un pic durant les dernières semaines. Comme le voyage pouvait être extrêmement long et ardu, des feuilles de coca lui étaient possiblement proposées aussi pour l’aider à combattre le mal d’altitude. En examinant les corps, aucune trace de coups ou de violence n’a été découverte. Ils sont probablement morts de froid tous les trois. L’alcool et la coca pouvaient être ainsi utilisés pour leurs effets désinhibants et anesthésiants.
Ces recherches ont permis de corroborer et d’enrichir les récits historiques sur les pratiques sacrificielles des Incas. Elles ont notamment confirmé l’utilisation de substances psychotropes dans les rituels. Ces momies, figées dans le temps, continuent de nous livrer leurs secrets et nous permettent de mieux comprendre cette fascinante civilisation inca.