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Une nouvelle recherche démontre qu’au temps de l’Empire romain, l’air était fortement pollué au plomb. Suffisamment pour intoxiquer les habitants de toute l’Europe et réduire leur quotient intellectuel.
Connais-tu le saturnisme ? C’est une maladie étrange qui survient lorsque notre organisme contient une quantité trop grande de plomb. À cause de notre environnement, nous avons tous un peu de plomb en nous, mais s’il est présent en trop grande concentration, il provoque de nombreux problèmes, dont des déficits cognitifs, des problèmes de santé comme des maladies cardiaques et une immunité réduite, ainsi que des problèmes de comportement comme une propension accrue à la violence. Le saturnisme tire son nom de la planète Saturne, qui est le symbole du plomb en alchimie.
Et cette intoxication au plomb est connue depuis de nombreux siècles. L’époque romaine, surtout, est réputée pour des pratiques qui favorisaient le saturnisme, surtout chez les gens plus fortunés : on mangeait et buvait dans de la vaisselle et des coupes en plomb, les tuyaux des aqueducs étaient en plomb, on sucrait la nourriture avec de l’acétate de plomb et l’on se maquillait avec du fard à joues à base de céruse de plomb… Sans oublier qu’on manipulait des pièces de monnaie, des bijoux et de nombreux autres objets en plomb !
Mais voilà qu’une étude démontre que les intoxications au plomb frappaient non seulement l’aristocratie, mais également le « petit peuple ». En analysant des échantillons prélevés dans des glaciers en Arctique. On a pu repérer un pic de la concentration de plomb dans l’air en Europe autour de l’an 200-300 de notre ère. En comparaison, le plomb atmosphérique à cette époque atteignait le triple de la concentration de plomb dans l’air actuellement aux États-Unis.
Il y avait à l’époque romaine un vaste système économique basé sur les métaux, incluant le plomb. L’expansion de l’Empire était d’ailleurs motivée en grande partie par la recherche de nouveaux gisements de métaux. Donc, l’élite s’intoxiquait allègrement au plomb par la nourriture et l’eau qu’elle buvait, mais les milieux ruraux étaient aussi exposés, par l’air ambiant. Dans ce cas, la pollution provenait des procédés miniers et d’extraction du plomb.
À partir des données trouvées dans les glaciers de l’Arctique, les scientifiques ont extrapolé les concentrations atmosphériques sur toute l’Europe ; et en se basant sur nos connaissances actuelles des liens entre le plomb atmosphérique et le plomb sanguin, ils ont évalué que les enfants de l’époque avaient un taux de plomb sanguin moyen de 34 microgrammes de plomb par litre. Pour comparaison, durant la préhistoire, le taux “naturel” était de 10. Au-dessus de 25, on parle de concentration anormale. À 50, on parle de saturnisme…
Donc, de nombreux enfants européens étaient touchés, partout sur le territoire. Les scientifiques estiment que le QI moyen des Européens à cette époque était plus bas de 3 à 4 points. Certains ont proposé dans les années 60 que le déclin de l’Empire romain pourrait s’expliquer par cette intoxication généralisée des Romains. Mais on sait maintenant que ce déclin a été multifactoriel, notamment l’arrivée de peuples du nord (les fameux barbares…). Mais ça n’a sûrement pas aidé…
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