La mission DART permettra de vérifier si l’impact d’un engin spatial sur un astéroïde permet de modifier la trajectoire de ce dernier. Sur cette illustration, on voit l’engin spatial DART et le LICIACube (de l’Agence spatiale italienne), qui recueillera des données sur l’astéroïde après l’impact. Image : NASA/Johns Hopkins, APL/Steve Gribben
Un engin spatial entrera bientôt en collision avec un astéroïde pour tenter de le faire dévier de sa trajectoire. Les scientifiques espèrent découvrir comment protéger la Terre contre de futurs impacts d’astéroïdes.
L’enthousiasme et l’excitation étaient palpables parmi les experts réunis lors d’une conférence de presse sur la mission DART (pour Double Asteroid Redirection Test). L’engin spatial, qui a été lancé en novembre 2021, devrait arriver à destination le 26 septembre prochain.
« Ce sera la première fois que l’humain tente de modifier le mouvement d’un corps céleste dans l’espace. Il s’agit d’un moment historique pour le monde entier », souligne Tom Statler, scientifique au Bureau de coordination de la défense planétaire, une organisation de la NASA. « L’impact d’un astéroïde sur Terre est un risque réel qui peut être évité. La défense planétaire s’affaire donc à trouver les astéroïdes susceptibles de croiser la route de la Terre, de les suivre, de déterminer leur orbite et de prédire s’il y aura collision ou non », ajoute l’expert de la NASA.
Les experts veulent être prêts à répondre à la menace si un astéroïde devait se diriger vers nous. C’est d’ailleurs l’objectif principal de la mission DART : tester cette technologie de déviation d’astéroïdes.
Pour ce faire, les astrophysiciens ont ciblé un système d’astéroïde binaire : l’astéroïde Didymos, qui mesure environ 780 mètres, et sa lune Dimorphos. Ces astéroïdes sont situés à 11 millions de kilomètres de la Terre. « Ce système a été découvert en 1996 par des télescopes, ici sur Terre. Les scientifiques l’ont étudié pendant des décennies. On sait donc très précisément que cela prend 11 heures et 55 minutes pour que Dimorphos complète son orbite autour de Didymos » mentionne Nancy Chabot, responsable de la coordination de DART au laboratoire de physique appliquée de l’Université Johns-Hopkins.
La sonde spatiale DART, avec sa masse de 550 kg, ira ainsi percuter à grande vitesse la petite lune Dimorphos, qui fait à peine 163 mètres de diamètre. « DART entrera en collision à une vitesse très rapide de 6,1 km/s [219 600 km/h]. L’écrasement du petit vaisseau spatial devrait seulement changer légèrement la trajectoire de Dimorphos autour de Didymos », détaille Nancy Chabot. Le plus grand défi technologique pour DART est de cibler avec précision et à grande vitesse le petit astéroïde sur lequel les scientifiques possèdent seulement des informations très limitées.
« Le vaisseau spatial DART utilise de manière autonome les images de sa caméra à bord pour identifier Didymos et Dimorphos, puis actionne de façon autonome les propulseurs pour s’assurer que le vaisseau spatial reste sur la bonne trajectoire », explique Nancy Chabot. Tout au long de la mission, des algorithmes assument la navigation autonome et le ciblage ultime de l’astéroïde.
Le grand public et les scientifiques découvriront en même temps les images retransmises par DART. « Beaucoup d’entre nous sont très excités par les dernières images que relaiera DART de Dimorphos. Ces images prises quelques minutes avant l’impact permettront de voir à quoi ressemble ce monde nouveau », s’enthousiasme Nancy Chabot.
Analyser la collision
L’engin DART transporte à son bord d’autres appareils qui seront déployés pour étudier le cratère formé à la suite de l’impact, mais aussi pour mesurer la déviation de l’astéroïde et en apprendre davantage sur sa composition, son champ de gravité ou encore sa structure. Selon Tom Statler, on s’attend à ce que l’orbite de Dimorphos soit modifiée après la collision. Ce changement pourra être détecté dans les jours ou les semaines suivants.
Qu’est-ce qui menace la Terre?
La très grande majorité des objets géocroiseurs (des astéroïdes qui sont susceptibles de croiser l’orbite de la Terre) de plus de 1 km ont été identifiés, selon Tom Statler, et ne représentent aucun danger. « Il ne faut pas négliger le danger potentiel de ces objets célestes. S’ils venaient à frapper la Terre, ils pourraient être dévastateurs au niveau local, mais aussi causer des effets ressentis partout sur la planète », assure-t-il.
Ayant comme mission de trouver les autres objets faisant plus de 140 mètres, le scientifique de la NASA estime en avoir trouvé environ 40%. « Il faudra encore 30 ans pour atteindre notre objectif de retrouver 95% de ces objets. » Il est cependant convaincu de pouvoir accélérer le rythme de ces trouvailles avec la mise en service de nouveaux télescopes, dont celui de l’Observatoire Vera-C.-Rubin, au Chili, ainsi que le lancement de nouvelles missions comme Neo Surveyor, en 2026.