Pour la première fois de l’histoire, six générations se retrouvent au même moment au travail. Comment faire cohabiter tout ce beau monde ?
Les doyens et doyennes de la génération alpha soufflant leurs 14 bougies, plusieurs décrochent leur premier emploi. Ils rejoignent ainsi les générations Z, Y, X, les baby-boomers et les traditionalistes (nés entre 1920 et 1945), dont une petite minorité travaille toujours. Cette diversité générationnelle peut avoir des effets bénéfiques sur les organisations, à condition de savoir bien gérer la cohabitation entre les âges. C’est le pari que fait Caroline Chevrier, ergothérapeute et doctorante en sciences biomédicales à l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR), dont la thèse est codirigée par les professeures Alexandra Lecours et Marie-Michèle Lord, du Département d’ergothérapie. Au moyen d’une recension de plus de 2000 écrits sur le sujet, la jeune chercheuse tente de mieux définir et comprendre le concept de coopération intergénérationnelle au travail (CIT) afin de dresser une liste des bonnes pratiques.
Chaque génération a-t-elle une façon de travailler qui lui est propre, une attitude ou des attentes particulières face au travail ?
Il n’y a pas de consensus dans le milieu de la recherche, ne serait-ce que pour définir ce qu’est une génération. Certains auteurs clament qu’il n’y a pas tant de différences entre les générations ; d’autres relèvent certains traits caractéristiques. Par exemple, pour les traditionalistes qui ont connu la guerre, l’éthique du travail, la hiérarchie et les règles sont considérées comme plus importantes. Des études avancent que les jeunes sont plus conscients de la diversité, de l’environnement ou des enjeux liés à la santé mentale et qu’ils recherchent un équilibre entre travail et vie personnelle. Il faut toutefois faire attention aux généralisations. Il y a des différences importantes au sein même des générations.
Quels sont les défis d’une telle diversité générationnelle ?
L’âgisme est encore très présent en milieu de travail. C’est même une des formes de discrimination les mieux tolérées, comparativement au racisme et au sexisme, sur lesquels on commence à être plus aiguisés. Il y a énormément de préjugés qui persistent entre les générations, et ce, dans toutes les directions. Les jeunes croient que les plus vieux sont malhabiles avec la technologie, sont rigides face au changement, par exemple. Les plus vieux ont tendance à croire que les jeunes ne sont pas fiables. Ces préjugés peuvent mener à des tensions, à des conflits et à des rivalités intergénérationnelles.
Quels sont les avantages d’une bonne coopération des générations ?
Au-delà de l’augmentation du bien-être et de la satisfaction au travail, la coopération entre les générations est liée à la transmission des connaissances, et elle aide donc au développement des compétences individuelles. Une bonne CIT est aussi bénéfique pour les équipes. Elle favorise un meilleur climat de travail, le partage des connaissances entre générations, une diminution du risque de conflits et une collaboration accrue au sein d’équipes de travail bénéficiant de perspectives variées, ce qui peut contribuer à améliorer la productivité, la performance et la compétitivité de l’organisation sur le marché du travail. Ces éléments contribueront également à rendre le milieu de travail plus attractif, favorisant la rétention du personnel.
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