Les dernières années furent éprouvantes pour la santé mentale des jeunes. L’ouverture à l’autre et l’activité physique sont-elles des solutions ?

Kristel Tardif-Grenier, professeure au Département de psychoéducation et de psychologie de l’Université du Québec en Outaouais. Photo: Karene-Isabelle Jean-Baptiste
« Comment penser qu’une personne ira bien si on se concentre toujours sur ses difficultés ? » lance Kristel Tardif-Grenier à propos du regard souvent négatif posé sur le monde de l’adolescence. Inquiète de la santé mentale des jeunes lors de la pandémie, la professeure au Département de psychoéducation et de psychologie de l’Université du Québec en Outaouais (UQO) a cherché des solutions du côté du développement positif, une approche basée sur la confiance en soi, le désir de contribuer à sa communauté et au monde, et l’affirmation de ses valeurs personnelles.
Tegwen Gadais prône lui aussi une approche holistique pour garantir le bien-être des jeunes. Le professeur au Département des sciences de l’activité physique de l’UQAM a plus d’une fois interpellé les autorités politiques et de santé publique sur l’importance pour les enfants de bouger, et pas seulement en contexte pandémique. « L’école est trop compartimentée, déplore le chercheur, alors qu’elle devrait s’organiser autour du développement global des jeunes. En ce moment, il y a les cours de français et de mathématiques d’un côté et les cours d’éducation physique de l’autre. » Et ces derniers obtiennent trop souvent, selon lui, la portion congrue du quotidien des élèves.
Il pense que la solution ne réside pas dans un nouvel aménagement des horaires, mais plutôt dans l’environnement scolaire. « Les jeunes ne marchent plus pour aller à l’école, déplore-t-il. Restreindre le stationnement pour inciter à la marche ou au vélo diminuerait la sédentarité et ses nombreux méfaits. »

Tegwen Gadais, professeur au Département des sciences de l’activité physique de l’UQAM. Photo: Émilie Tournevache
Convaincu des vertus du collectif, Tegwen Gadais tente aussi de déterminer si les activités artistiques en groupe, ici et ailleurs, comme à Madagascar, apportent autant que le sport et développent le sentiment d’appartenance et une meilleure estime personnelle. « Il faut tenir compte des sensibilités de chacun et chacune : bien des gens n’aimeront jamais le sport ou le camping. Le plein air, c’est magique… mais pas pour tout le monde ! »
Favoriser l’activité sous toutes ses formes pour le bien-être des jeunes revient à tous. Pas seulement au personnel scolaire et aux parents ! Kristel Tardif-Grenier se penche sur les bienfaits des « adultes significatifs non parentaux », par exemple les entraîneuses et entraîneurs sportifs. « On a tendance à croire que les adolescents privilégient les relations avec les gens de leur âge, mais plusieurs recherchent du soutien chez les adultes, parfois même auprès d’amis de leurs parents. Pour un jeune issu de l’immigration ou vivant dans un milieu défavorisé, la présence d’un entraîneur peut faire toute la différence en lui permettant de tisser des liens que la famille ne peut pas toujours offrir. »
Or la sensibilité des jeunes est particulièrement exacerbée depuis quelques années, constate Kristel Tardif-Grenier. « Plusieurs intervenants évoquent une hausse de la violence et de l’intimidation. Les jeunes ont plus de difficultés à interagir avec les autres, à faire preuve d’empathie. C’est pourquoi je m’intéresse aussi aux relations intergénérationnelles : on ne les valorise pas suffisamment, alors qu’elles apportent beaucoup de bienfaits, dont un regard plus positif sur la jeunesse. »
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