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10 mai 2023
Temps de lecture : 2 minutes

Quel avenir pour les érables à sucre du Québec dans un climat qui change?

Photo: diapicard/Pixabay

L’érable à sucre subira inévitablement les contrecoups d’un environnement de plus en plus chaud. Mais il ne migrera pas si facilement vers le nord, selon des scientifiques qui ont discuté de l’avenir de ce symbole au 90e Congrès de l’Acfas, à Montréal, le 9 mai.

« Où produira-t-on du sirop d’érable dans les 10, 20 ou 50 prochaines années? » a lancé en guise d’introduction Dominique Gravel, professeur de biologie à l’Université de Sherbrooke, à l’auditoire composé principalement de scientifiques et de propriétaires d’érablières.

Il a expliqué que la niche écologique de l’érable à sucre (Acer saccharum), c’est-à-dire l’ensemble des conditions environnementales qui permettent à l’arbre de se maintenir, risque de se déplacer fortement vers le nord dans les prochaines décennies. Selon une modélisation de 2007 menée par une équipe canadienne, l’érable à sucre pourrait se retrouver dans le Nord, près de la baie d’Ungava, en 2100. Le modèle utilisé pour cette étude, « était très répandu pour produire différents scénarios de biodiversité, mais il y avait clairement place à l’amélioration, ce à quoi j’ai travaillé dans les dernières années », a spécifié Dominique Gravel.

Le chercheur a notamment tenu compte dans son nouveau modèle de facteurs tels que la vitesse de migration de l’érable à sucre dans un environnement changeant (température, incendie, sécheresse), les interactions avec des animaux (chevreuils, oiseaux, insectes) et la compétition avec les espèces d’arbres déjà en place.

Une montée vers le nord pas si facile

Ce modèle, qu’il a présenté lors du colloque Les érablières dans un environnement en mutation au congrès de l’Acfas, dresse un portrait différent des projections précédentes. « Il n’y aura pratiquement pas de mouvement vers le nord pour les communautés tempérées ou mixtes d’ici la fin du siècle », peut-on lire dans une étude publiée par le chercheur et ses collègues en 2020 dans le Journal of Biogeography.

Pour confronter son modèle au terrain, le chercheur de l’Université de Sherbrooke et son équipe ont ensemencé des érables à sucre dans 15 forêts localisées dans et au-delà de l’aire de répartition actuelle pour savoir où la germination des semis est possible. Dans son aire de répartition actuelle, l’érable à sucre n’a aucune difficulté à se développer. Mais son implantation « chute énormément dans la forêt boréale, ce qui indique qu’une résistance nuit à son établissement », a mentionné le chercheur.

Cette résistance est influencée par les conditions de germination, le sol, le microclimat ou le microbiome. Sans compter que si une pousse arrivait à croître un peu plus au nord, elle risquerait fort de se faire manger par un chevreuil, dont l’aire de répartition est étendue.

À moins que l’on fournisse un coup de pouce aux arbres? Yann Surget-Groba, professeur en génomique écologique et environnementale à l’Université du Québec en Outaouais (UQO), propose de procéder à la migration assistée des érables à sucre. Il l’a d’ailleurs déjà essayé! « On prend des graines qui proviennent de différentes zones, idéalement dans l’aire de distribution de l’arbre. Par exemple, on a utilisé des graines [d’érable à sucre] du Québec et du Nouveau-Brunswick qu’on a fait pousser dans des jardins à Ripon [en Outaouais] et à Chicoutimi pour voir leur adaptation à différents environnements », explique le chercheur. Cette façon de faire permet de sélectionner ensuite les plants qui pourraient éventuellement être capables de pousser au-delà de la forêt boréale.

La génétique de l’érable à sucre

Le professeur Surget-Groba se spécialise dans la génomique, dans l’espoir d’aider la gestion des érablières. Jusqu’à récemment, au Québec, il y avait peu de connaissances génétiques sur cette espèce. Le chercheur a lancé un projet pour évaluer le potentiel d’amélioration génétique de l’érable à sucre sur deux aspects : la production de sucre et la résilience face aux changements climatiques. L’un des problèmes soulevés par M. Surget-Groba est qu’il y a un risque que les populations d’érable à sucre s’adaptent mal au futur climat.

Les scientifiques ont du pain sur la planche pour assurer l’avenir de cette précieuse ressource : rappelons que chaque année, le Québec produit plus de 70% du sirop d’érable consommé sur la planète.

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