Image: Marina Hobbs/Pixabay
Pendant la période du Grand Confinement, marquée par une diminution de la présence humaine, les animaux se sont déplacés beaucoup plus que d’habitude.
Des couguars qui s’aventuraient dans les zones urbaines de Santa Cruz, en Californie, ou des troupeaux de chèvres déambulant dans les rues désertes d’une ville côtière du Royaume-Uni ont fait les manchettes au printemps 2020. Ces comportements inhabituels chez les animaux ont suscité un vif intérêt, y compris chez les scientifiques.
Le confinement des premiers mois de la pandémie a constitué un terrain d’observation mondial pour étudier l’impact de la présence humaine sur le comportement animal. « Ces changements de comportements observés chez les animaux pendant le confinement sont-ils anecdotiques, ou réellement significatifs? » s’est demandé Aafke Schipper, professeure associée en science environnementale à l’Université Radboud de Nimègue, aux Pays-Bas. Elle a étroitement collaboré avec sa collègue Marlee Tucker, autrice principale d’une vaste étude sur le comportement animal publiée en juin dans Science. Au total, près de 175 scientifiques y ont contribué.
À travers le monde, différentes équipes étudient les déplacements à l’aide de systèmes de localisation GPS placés sur les animaux. Ces données sont rassemblées dans des bases de données comme Movebank et EUROMAMMALS. Typiquement, le déplacement des animaux est influencé par le mouvement des humains (les voitures, par exemple) et les infrastructures (les routes, entre autres).
L’équipe dirigée par Marlee Tucker a ainsi examiné les données GPS des bases de données ainsi que de celles fournies par des collaborateurs et collaboratrices. En tout, les scientifiques ont pu analyser les déplacements de 2 300 grands mammifères terrestres (éléphants, girafes, ours, cerfs…), appartenant à 43 espèces différentes, avant et pendant le confinement.
« Nous avons constaté que là où le confinement était plus strict, et les gens moins autorisés à sortir de chez eux, les animaux parcouraient de plus longues distances », note Aafke Schipper. Les mammifères ont ainsi commencé à explorer de nouveaux territoires qui étaient habituellement en présence d’humains.
« Nous avons aussi observé que les animaux se rapprochaient des routes, en particulier dans les zones densément peuplées », mentionne la chercheuse. En comparant les données avant et pendant le confinement, elle a été surprise de voir que les animaux étaient moins craintifs. « Les résultats de notre analyse suggèrent que les animaux présentaient moins de comportements d’évitement ou qu’ils étaient moins enclins à fuir », ajoute-t-elle.
Suivre une infime partie des animaux
L’étude publiée dans Science se concentre sur une petite portion des mammifères et les résultats ne peuvent pas être généralisées à toutes les espèces animales. Les scientifiques sont conscients de n’avoir accès qu’à un mince inventaire, celui des animaux qui sont en général les plus observés.
« Nous avions 43 espèces de mammifères, mais au total, il existe plus de 5 500 espèces de mammifères », pointe-t-elle. Par exemple, peu d’espèces de chauves-souris sont suivies de façon générale. Ces dernières ont-elles été touchées ou non par le confinement? Les scientifiques l’ignorent.
Cependant, pour les espèces incluses dans l’étude, il est indéniable que les humains ont des impacts sur le comportement animal. « En réduisant la présence humaine, les animaux reprennent possession de l’espace. Je trouve cela intéressant de voir la capacité d’adaptation des humains et la résilience de la nature », dit Aafke Schipper.
Le comportement des animaux est-il revenu à ce qu’il était avant le confinement? Il est trop tôt pour le dire. Marlee Tucker et Aafke Schipper continuent d’être attentives au déplacement de la faune et d’analyser les données afin de le déterminer.
L’activité humaine mise sur pause
En 2020, un groupe de biologistes a proposé le terme « anthropause », pour définir la réduction à l’échelle mondiale de l’activité humaine. Pendant cette période, des milliards d’humains ont drastiquement diminué leurs déplacements (en voiture et en avion particulièrement).