FF est un adulte mature. De temps à autre, il sort boire avec des amis, puis retourne chez lui, un peu éméché. Rien de bien singulier, si ce n’est que FF est un chimpanzé sauvage.
Le «bar» qu’il fréquente est une palmeraie d’Afrique occidentale. Près du village de Bossou, à l’extrême sud-est de la Guinée, des villageois entaillent les palmiers à raphia ( Raphia farinifera ), comme nos acériculteurs entaillent leurs érables, pour en soutirer la sève et fabriquer du vin de palme. Puis, ils fixent à l’arbre un contenant de plastique afin de recueillir le liquide blanchâtre et laissent la gravité faire son travail. En quelques heures à peine, une fermentation naturelle s’amorce dans le godet où l’alcool s’accumule graduellement.
Entre deux passages des villageois, les chimpanzés du coin ne se gênent pas pour venir trinquer. Kimberley Hockings, spécialiste en écologie comportementale à l’université Brookes d’Oxford, au Royaume-Uni, les a vus faire. «La première fois, ça a vraiment suscité mon intérêt, se souvient-elle. Mais je n’ai pu observer ce comportement qu’à quelques occasions. Alors, j’ai contacté d’autres chercheurs qui ont travaillé avec cette communauté de singes au cours des 20 dernières années et je leur ai demandé de fouiller leurs cahiers de notes.»
Le résultat est un article collaboratif, publié en juin dernier dans la revue Royal Society Open Science