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04 mai 2023
Temps de lecture : 2 minutes

Le « microbiome » urbain dévoilé par les abeilles

Des abeilles qui butinent dans la ville de Toronto. Photo: Shawn Caza/Wikimedia Commons

Chaque ville possède sa propre empreinte microbienne. C’est ce qu’a conclu une équipe américaine, qui a utilisé des enquêtrices hors pair : les abeilles urbaines.

À quoi ressemble le microbiome d’une ville? Comme notre peau ou nos intestins, les villes abritent plusieurs communautés de microorganismes qui peuplent l’air, l’eau, le sol, etc. Et cette empreinte microbienne est unique à chaque agglomération! C’est ce qu’a montré Elizabeth Hénaff, professeure et ingénieure au Center for Urban Science and Progress de l’Université de New York, dans une étude publiée dans Environmental Microbiome.

Avec son équipe, elle a utilisé une méthode inusitée : elle a étudié des ruches posées sur les toits de Brooklyn, à New York.

Les abeilles, qui jouent un rôle essentiel en transportant le pollen d’une fleur à l’autre, emportent aussi avec elles différents microorganismes jusqu’à colonie. « Chaque humain, chaque étang, chaque arbre est entouré de son propre nuage microbien, a précisé Elizabeth Hénaff lors d’une conférence de presse tenue en avril dernier. Ainsi, lorsque les abeilles partent à la recherche de nourriture, elles traversent tous ces nuages microbiens rattachés à différents environnements de la ville. »

L’équipe a d’abord identifié les éléments de la ruche qui donnaient le plus d’informations sur la composition du microbiome urbain. En travaillant avec des apiculteurs locaux, les scientifiques ont prélevé du miel, de la propolis, des débris au fond de la ruche, des échantillons à l’intérieur et à l’extérieur de la ruche et des abeilles mortes. Ils ont procédé au séquençage métagénomique de ces extraits (séquençage de tout l’ADN présent).

« Ce qui variait [génétiquement] d’une ruche à l’autre s’est révélé être les débris qui se trouvaient au fond », fait ressortir la chercheuse de l’Université de New York. Constitués notamment de particules végétales, de cire et de particules diverses, les débris forment une couche fine et collante au fond de la ruche. « C’est ce matériel que nous avons décidé d’utiliser pour la suite de l’étude », ajoute-t-elle.

L’équipe a alors passé au peigne fin des ruches situées à Tokyo, Sydney, Melbourne et Venise. Les scientifiques ont calculé que les abeilles urbaines couvrent en moyenne un territoire d’environ 3 km de rayon autour de leur ruche. Ils ont ensuite récolté les débris des ruches pour le séquençage métagénomique et ainsi identifié les microorganismes faisant partie du microbiome urbain.

Un microbiome urbain unique

Selon l’équipe américaine, chaque ville détient sa propre signature génomique environnementale. « Ces signatures microbiennes sont influencées par le contexte culturel et géographique. Par exemple, à Venise, parmi les principales espèces, nous avons identifié des champignons qui sont habituellement associés à la décomposition du bois », explique la chercheuse. La ville italienne possède de nombreux bâtiments construits sur des pilotis de bois. À Melbourne, l’équipe américaine a observé des espèces microbiennes associées à l’eucalyptus, très abondant; et, à Tokyo, elle a décelé des levures jouant un rôle dans la fermentation de la sauce soya.

« Pour ceux d’entre nous qui habitons dans les villes – soit plus de la moitié de la population mondiale – il est important de pouvoir caractériser les microbiomes urbains dans lesquels nous vivons, travaillons et dormons », estime la chercheuse. Elle précise que le microbiome urbain pourrait même influencer notre propre microbiome.

Dans le futur, cette méthode de caractérisation du microbiome urbain pourrait potentiellement être utilisée pour détecter la présence de certains pathogènes. Par exemple, à Tokyo, l’équipe a pu identifier des pathogènes tels que la bactérie Shigella (responsable d’infections intestinales) et la bactérie Rickettsia felis, qui infecte à la fois les félins et les humains via les puces des chats. L’étude fait la preuve, s’il le fallait, que les abeilles sont décidément bien utiles : ces informatrices n’ont pas fini de livrer leurs secrets.

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