L’essayiste et historien belge Jean-Claude Bologne a examiné sous toutes ses coutures le rapport des femmes à leurs vêtements. D’abord dans son vaste ouvrage Histoire de la pudeur (Olivier Orban, 1986) et, plus récemment, dans Pudeurs féminines. Voilées, dévoilées, révélées (Seuil, 2010). Pour lui, le voile n’est pas un symbole religieux et les politiciens qui cherchent à l’interdire font le jeu des islamistes radicaux.
Dans le débat sur la laïcité, au Québec comme en France, on a tendance à faire du voile l’apanage de la religion musulmane. Qu’en dites-vous?
Le port du voile est bien antérieur à l’islam! En Syrie, au XIe siècle avant notre ère, c’était un symbole de condition sociale. Les femmes de rang élevé le portaient pour se protéger du soleil. Plus tard, il s’est répandu à Rome à l’époque de l’Empire. Les femmes mariées s’en paraient pour signifier qu’elles appartenaient à leur époux. Les mœurs se sont relâchées en Europe et le voile est devenu de plus en plus rare. Sauf au Moyen Âge, où il a ressurgi, du XIIe au XVIe siècle, sous l’influence des croisades. Les femmes le mettaient par pure coquetterie.
Le Coran lui a-t-il fait perdre sa dimension sociale pour en faire un symbole religieux?
Absolument pas. Il est question du voile dans le Coran, mais il y a une large place à l’interprétation.