Le 12 janvier 2010, des milliers de petits Haïtiens ont vu leur enfance basculer. Beaucoup ont tout perdu: amis, école, maison, parents, frère ou sœur. Comment vont-ils se remettre d’un tel traumatisme?
Isaac a refusé durant tout l’hiver de mettre ses bottes et son manteau, et de marcher dans les rues glaciales de Montréal. Buté, ses petits poings serrés le long de son corps, il n’a cessé de protester, avec toute la force de ses trois ans. «Il ne veut pas sortir, il reste accroché à moi», raconte sa mère, Djina Laguaire, assise à la table de la cuisine de son petit appartement de Montréal-Nord.
C’est qu’Isaac a eu très peur de perdre sa maman. Dans l’après-midi du 12 janvier 2010, le petit garçon jouait dans la cour de sa maison de Delmas, un quartier de Port-au-Prince. Sa mère était à l’intérieur, avec son aîné de 11 ans, Adjison.
Puis, à 16 h 53, la fin du monde est arrivée.
«Tout tremblait. J’ai empoigné Adjison et nous sommes sortis. Je ne savais pas où était Isaac; je l’ai trouvé dans la cour. Notre maison s’est écroulée sous nos yeux. Les murs tombaient sur les gens; tout était blanc de poussière. Nous sommes restés dans la rue plusieurs heures. Isaac hurlait. Adjison ne disait rien. Pas un mot.