Photo: Shutterstock
Trop souvent, certains médecins omettent de considérer le savoir expérientiel de leurs patients, se fiant uniquement à leurs connaissances scientifiques pour formuler un diagnostic.
L’histoire se déroule il y a environ cinq ans. Je suis alors étudiante en médecine, en stage d’hématologie. J’entre dans la chambre d’un patient atteint d’une grave anémie auto-immune : son système immunitaire attaque indûment ses globules rouges et lui cause ainsi une fatigue extrême et des douleurs thoraciques, comme s’il faisait plusieurs fois par jour une « petite » crise cardiaque. Je m’approche de lui, un peu à reculons. « Et puis ? À combien sont mes globules rouges ? me demande-t-il, tout sourire. Je me sens comme si j’avais 80 d’hémoglobine ! » Ma réponse : son taux est de 56 grammes par litre de sang, la normale étant au-delà de 140. Déception. Je réconforte le patient, promets d’adapter son traitement, d’envisager une transfusion. Il acquiesce, dépité. Comme tout patient atteint d’une maladie rare, il est devenu un spécialiste de son état de santé.
Quelques heures plus tard, je reçois une note du laboratoire m’avisant qu’il y a erreur. Le taux d’hémoglobine de mon patient est bel et bien de 81 aujourd’hui ! Je retourne à sa chambre, triomphante : « Vous aviez raison ! » Je me rappelle avoir bien rigolé avec lui.